Reconnaitre et gérer une crise d'angoisse

Magali MORENO, Octobre 2018

La crise d’angoisse, autrement appelée crise de panique ou attaque de panique, est un épisode bref et marquant par son intensité. Les symptômes éprouvés durant la crise sont à la fois physiques, psychiques et émotionnels.

Elle est impressionnante pour la personne s’y trouvant confrontée, difficile à comprendre et à accepter, mais elle n’est pas forcément grave.

Que faire pour se calmer efficacement et faut-il y donner suite ?

Comment reconnaitre une crise d'angoisse?

« Cela s’est présenté comme çà, sans prévenir. J’étais en soirée avec des amis. On riait, on s’amusait bien, j’étais parfaitement détendu. Tout allait pour le mieux. Et là, soudainement, j’ai commencé à me sentir vraiment très mal. J’ai ressenti des vertiges, des frissons. Mon cœur battait la chamade et j’avais les mains qui tremblaient. Tout mon corps était en sueur, tendu à l’extrême. A l’intérieur, j’avais l’impression que j’allais exploser, dans ma tête et dans ma poitrine. Je ne comprenais rien à ce qu’il se passait. J’ai cru que j’avais une crise cardiaque, que j’étais en train de mourir. Mes pensées allaient très vite. J’ai eu réellement très peur sur le coup. Je ne pouvais plus rien contrôler. Cela a duré plusieurs minutes qui m’ont semblées être une éternité. 

Depuis ma crise, je suis dans l’angoisse permanente que cela recommence. J’ai constamment peur de sortir de chez moi, que cela me surprenne à n’importe quel moment. Je ne sors plus que lorsque j’y suis obligé. Je ne vais plus à la faculté. Je reste dans ma chambre qui est l’endroit où je me sens le plus en sécurité et où j’arrive à me sentir un peu plus calme. Je ne veux pas que mes amis viennent me voir, j’ai honte. J’y pense sans cesse, c’est devenu une idée fixe. Je crois que je deviens fou, cela ne me quitte pas. J’aimerais arrêter d’y penser tout le temps et redevenir celui que j’étais avant. Je voudrais comprendre ce qui m’est arrivé et surtout pourquoi. C’est insoutenable de ne pas savoir. J’ai besoin d’aide pour me soulager et trouver une solution à cet enfer. »

Témoignage d’un patient, 20 ans, étudiant.

Ce patient a par ailleurs une vie équilibrée, sans souci particulier. Il n’y a pas d’incident dans son histoire personnelle qui permettrait d’éclairer cet évènement. Il est bien intégré socialement, pratique du sport en équipe et s’entend bien avec sa famille. Ses études lui plaisent et il réussit plutôt bien.

Ce témoignage nous apprend que la crise d’angoisse est un épisode « aigu », d’une durée brève de quelques minutes à quelques heures, et surtout isolé. Elle se manifeste très brutalement. Aucun signe annonciateur ne permet de prévoir la survenue de la crise. Elle peut survenir à tout moment, dans le métro, en soirée, en voyage, alors que nous comme seuls ou accompagnés.

Tout le monde peut être a priori concerné. Elle n’est pas rare du tout ! Selon les estimations, 10 à 20% de la population a connu ou connaîtra au cours de sa vie une crise. Les personnes les plus exposées seraient les jeunes adultes, plutôt les femmes. Les personnes ayant une personnalité anxieuse ou dépressive seraient a priori plus touchées.

La crise d’angoisse se présentent avec des symptômes de détresse aux niveaux physique, psychique et émotionnel. L’ensemble de l’organisme réagit exactement comme s’il était en présence d’un danger très grave et imminent alors qu’il est en parfaite sécurité. Le système nerveux (cerveau) indique au système hormonal (glandes surrénales) de lancer la sécrétion d’hormones activatrices. Ces dernières se diffusent dans l’organisme à une très grande vitesse et l’amènent à accélérer son fonctionnement de base. L’ensemble du corps est alors en phase d’alarme extrême.

Essayez de courir 100 mètres comme si vous tentiez d’échapper à un animal dangereux et que votre vie s’en trouvait menacée. A la fin de l’exercice, vous allez ressentir exactement les symptômes d’une crise d’angoisse. Au niveau physique, l’ensemble des fonctions vitales se trouvent suractivées : respiration accélérée ou gêne respiratoire, élévation de la pression sanguine et de la température, dilatation des pupilles, tremblements, hypertension musculaire, sueurs, oppression thoracique, palpitations, élévation de la vigilance, vertiges, nausées, vomissements... peuvent se présenter au tableau. Une perte de connaissance peut survenir.

Au niveau psychologique et émotionnel, l’évènement est perçu avec une très grande intensité. La personne est traversée par une peur extrême, celle de ne pouvoir échapper à la situation, parfois la peur de mourir (de faire une crise cardiaque ou une attaque cérébrale par exemple), de perdre la raison. Elle ressent une perte de contrôle de ses émotions et de ses réactions qui la place en détresse.

La crise de panique est très éprouvante pour celui qui la subit.

Quelles sont les causes d'une crise d'angoisse ?

Les personnes ayant traversé un épisode isolé sont en général très inquiètes d’en comprendre la cause. Elles souhaitent identifier l’élément explicatif, déclencheur, à l’origine de cette expérience. Mais la réalité est que la crise isolée n’a pas vraiment de déclencheur.

Les mécanismes ne sont pas connus, nous savons simplement qu’ils font intervenir différents facteurs pouvant interagir :  biologique, génétique, psychologique, cardio-respiratoire.

Ne pas identifier l’origine de la crise devient souvent très difficile à accepter par ceux qui l’ont vécue. Une anxiété consécutive à l’incident, lié à la peur qu’il survienne à nouveau peut alors apparaître. C’est une anxiété par anticipation.

Lorsque la crise intervient en réaction à une cause identifiée, et lorsqu’elle se répète, d’autres troubles vont être évoqués par les spécialistes :

  • Trouble phobique si la crise est déclenchée par l’exposition à des situations ou des objets qui ne sont pas dangereux en eux-mêmes,
  • Stress post-traumatique si la crise survient à la suite d’un évènement douloureux, traumatisant (accident, attentat, agression…), récent ou ancien, et qui remonte à la surface,
  • Trouble anxieux si les crises surviennent sans raison de manière répétée.

Il est reconnu que la prise de drogue ou de certains médicaments constitue un terrain favorable aux crises d’angoisse.

Comment réagir face à une crise ?

La première réaction à avoir est d’adresser des signaux d’apaisement au cerveau afin qu’il commande l’arrêt de la production d’hormones stimulatrices (l’adrénaline notamment). Cela revient à l’informer que tout va bien pour l’autoriser à freiner l’accélération générale des fonctions vitales.

Réagir permet également de rester concentrer et ainsi de diminuer la sensation de perdre la raison. Le sentiment de reprendre le contrôle de la situation permet d’en sortir plus rapidement.

Respirer

Dans un premier temps, modifier consciemment sa respiration sera très efficace.

Une idée reçue est de se forcer à prendre de grandes inspirations profondes et rapides. Or, le risque est d’hyperventiler, ce qui favorise les vertiges et les malaises. La bonne attitude est de chercher plutôt à ralentir et à calmer sa respiration. Cette modification entraînera dans son sillage le ralentissement du rythme cardiaque et un retour progressif à la normale qui évitera tout malaise.

Voici un petit exercice ralentir sa respiration : prendre une inspiration par le nez, puis souffler doucement et lentement par la bouche, comme si on soufflait dans une paille, jusqu’à vider l’air totalement. Recommencer autant de fois que nécessaire.

SE METTRE EN SECURITé

Les réactions physiques qui se déclenchent très rapidement dans le corps peuvent provoquer un malaise, ou une perte de conscience. Il est important pour cela, si cela est possible, de se mettre rapidement en sécurité et ainsi éviter de se blesser :

-          S’assoir, n’importe où, même par terre s’il le faut, pour prévenir la chute en cas de malaise

-          Stopper son véhicule si on est en train de conduire

-          Si possible, se rendre dans un endroit calme

-          Eviter de prendre son pouls ou sa tension car le résultat pourrait venir amplifier l’anxiété ressentie sur le moment et augmenter les symptômes

-          Ne pas s’agiter

-          Avertir quelqu’un près de soi. Demander de l’aide afin qu’il puisse veiller sur nous et nous rassurer

ACTIVER DES IMAGES POSITIVES

Durant la crise, les émotions et les pensées sont noyées dans une frayeur extrême et des idées noires (peur de mourir ou de perdre la raison) qui peuvent sur-aggraver l’anxiété si on les laisse courir.

Pour limiter ce cercle vicieux, vous pouvez tenter d’apprivoiser vos pensées en les orientant consciemment sur une image mentale positive.

Par exemple : pensez à un lieu ressource et imaginez-vous comme si vous y étiez, visualisez le visage de vos enfants et souriez-leur, pensez à un de vos projets positifs (prochains départs en vacances), rappelez à votre mémoire un souvenir agréable…

Et après ?

Une crise de panique isolée ne présente que peu de gravité en elle-même. Elle est néanmoins spectaculaire et éprouvante.

Il serait, par ailleurs, faux de dire que les difficultés respiratoires ou cardiaques relèvent toujours d’une crise d’angoisse. Des maladies peuvent expliquer la crise (l’asthme, par exemple, peut aussi se manifester sous forme de crise assez spectaculaire).

De plus, après une crise de panique, comme nous l’avons observé chez notre étudiant-témoin, les personnes développent presque systématiquement une anxiété vis-à-vis d’une nouvelle attaque. Le fait de ne pas trouver de cause explicative vient nourrir cette anxiété. Le mal-être devient permanent. On parle alors d’anxiété anticipatoire qui peut impacter gravement la qualité de vie au quotidien : peur de sortir même pour réaliser des activités simples comme faire ses courses, isolement, arrêt de travail…

C’est pour toutes ces raisons que consulter dans les jours qui suivent une crise un médecin est nécessaire. Grâce à un interrogatoire minutieux, et s’il l’estime utile, grâce à des examens complémentaires, il saura poser le diagnostic précis et rassurer le patient sur l’accompagnement qui peut être proposé.

Il pourra prescrire une thérapie médicamenteuse adaptée à la personne. Ces traitements, anxiolytiques et antidépresseurs, peuvent avoir des effets secondaires et créer une dépendance. L’accompagnement du médecin est donc primordial et le respect des prescriptions sera important pour ressentir les améliorations.

Il évaluera également si, à ce stade, il est nécessaire de recourir à l’accompagnement d’un autre professionnel de la santé mentale, psychiatre ou psychologue. Les techniques permettant de réguler l’anxiété (méditation, sophrologie, yoga, etc.) pourront également être conseillées.

Et si les crises se répètent ?

Si les crises se répètent, la question doit être abordée plus en profondeur. Un trouble psychologique doit être recherché (trouble anxieux, trouble phobique, trauma).

En effet, des difficultés psychiatriques plus prononcées peuvent survenir secondairement à la répétition des crises, surtout si leur fréquence devient élevée : agoraphobie (peur de la foule), dépression, addictions, pensées suicidaires…

Pour enrayer une éventuelle évolution de ce type, un traitement adapté pourra être prescrit par le médecin ou le psychiatre.

En complément au traitement médicamenteux, l’orientation vers un spécialiste psychiatre ou un psychologue et l’entrée dans une psychothérapie deviennent hautement recommandée pour accompagner la personne dans ses troubles.

Les thérapies d'approche contemplatives (méditation, sophrologie), comportementales et cognitives (TCC), l’EMDR, peuvent être citées. En aidant la personne à s'ancrer dans le présent, à observer ses émotions, et à modifier ses pensées anxieuses, ces thérapies seront un accompagnement efficace dans une démarche globale visant le mieux-être.

Dans tous les cas, ces crises ne sont pas une fatalité. Il est possible d’agir en s’entourant de professionnels qualifiés.